Beau, bon, pas cher
Julie a 40 ans et monte à cheval depuis des années. Elle a déjà eu trois chevaux à tour de rôle, et magasine son quatrième. Elle a monté beaucoup et privilégie surtout la randonnée de loisir. Elle a fait un peu de tout et a essayé plusieurs disciplines, sans approfondir. Elle n’a jamais monté en compétition et n’en a pas l’intention. Elle a suivi des cours, principalement au début pour apprendre à se tenir en selle, ensuite plutôt rarement, surtout pour régler des problèmes spécifiques. Elle est passionnée de chevaux, lit beaucoup et assiste à toutes sortes d’événements équestres en tant que spectateur. C’est vraiment un loisir et une détente pour elle, une activité qu’elle adore et qui est censée la libérer du stress du travail et du quotidien.
Elle n’a pas un gros budget, mais est prête à magasiner longtemps pour trouver le cheval qui lui plaira. Elle le veut jeune, pour pouvoir le voir se développer et pour éviter les problèmes de santé qu’elle a eu avec ses autres chevaux, qui étaient tous âgés.
Finalement, elle s’achète un joli cheval d’une très belle couleur, 2 ans et demi, à peine débourré et très flamboyant. Il n’était pas cher, le propriétaire est un amateur qui l’a élevé dans sa cour, veut vendre et le cheval n’a pas de pedigree connu.
Calme lors de la visite initiale et durant la première semaine, il est évident que Pégase n’est pas musclé et a besoin de prendre du poids. Julie le met donc au travail et lui donne une ration pour le faire engraisser. Dès les premiers essais à la longe, Pégase démontre déjà qu’il ne la respecte pas et qu’il ne se met pas facilement au travail. À l’écurie, il babine beaucoup, mord parfois et devient rapidement hyperactif. Il ne tient pas en place dans l’allée, attrape tout ce qui bouge par la gueule, ne se laisse pas facilement manipuler. Qu’à cela ne tienne, Julie va entreprendre son éducation.
Durant les deux prochaines années, Julie passera de nombreuses heures à l’écurie à essayer d’éduquer son poulain. Elle arrive à certains résultats, mais c’est laborieux et cela lui demande énormément d’énergie. Les premiers mois sous la selle sont très difficiles, Pégase ne répond pas beaucoup aux aides, ne tourne pas, part en fou, se précipite contre les murs et les autres chevaux. Il a énormément d’énergie, il réagit très rapidement, est intelligent et possède de nombreux mécanismes de défense. Il devient assez facilement agressif lorsqu’il est contrarié. Ses réactions sont tellement rapides que Julie est bien souvent dépassée.
Elle décide de faire monter Pégase par un entraîneur quelques mois. L’entraîneur démontre que le cheval fait des progrès, mais lorsque c’est elle qui le monte, elle a encore beaucoup de mal à se faire respecter. Elle doit travailler longtemps pour avoir un résultat acceptable et un cheval attentif. Elle ne réussit pas à lui faire faire la même chose que l’entraîneur. À l’écurie, le comportement de Pégase se dégrade. Il mord régulièrement, charge parfois, se comporte mal en laisse, et n’ai pas beaucoup apprécié des palefreniers qui doivent s’en occuper. On doit le mettre le changer de place pour éviter les blessures aux visiteurs et Julie, qui aime les voyages, a du mal à trouvez des gens pour s’en occuper lors de ses absences, car il n’est pas facile et pas toujours sécuritaire.
Que s’est-il passé? Julie a surtout été impressionnée par l’allure et la couleur de son cheval, et par le prix qui lui convenait. Elle avait bien établi des critères précis pour faire son choix, malheureusement elle n’avait pas les moyens ni l’expérience pour évaluer le tempérament du cheval qu’elle a acheté. La visite superficielle ne lui permettait pas de faire ressortir les problèmes de comportement qu’elle a découvert plus tard. De plus, Pégase, sous-alimenté et en manque d’exercice, n’avait pas son niveau d’énergie normal lorsqu’elle l’a acheté. Nourri et en forme, le naturel est revenu au galop! Autre erreur: ce type de cheval supporte mal le stress de la vie au boxe, et pourrait être plus calme s’il était gardé principalement à l’extérieur en compagnie d’autres chevaux, spécialement des juments plus âgées qui se chargeraient de lui apprendre les bonnes manières. Julie a préféré le garder dans une écurie proche de chez elle qui n’offre pas ce type de service, pour éviter de perdre trop de temps en déplacements après sa journée de travail.
Aujourd’hui, Julie continue à travailler avec son cheval, mais son loisir ressemble plus à une obligation et elle revient souvent de l’écurie frustrée et tendue. Elle aimerait le revendre d’ici un an, mais Pégase fait peu de progrès et s’est fait une mauvaise réputation dans les écuries qui l’ont hébergé, ce qui pourrait lui nuire. Elle doit passer beaucoup de temps pour le ‘défouler’, le calmer, et lui apprendre à respecter. Elle n’a donc plus beaucoup de temps pour faire de la promenade et n’a pas tout le plaisir attendu de sa relation avec son cheval.